Emilie Laperrière

Le ministère des Transports du Québec est bien retourné à sa table à dessin. Un an après le dépôt du rapport du Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE), le gouvernement a présenté le 9 novembre dernier le nouvel échangeur Turcot, revu et corrigé.

 

Intégrant 37 des 39 recommandations du BAPE, le projet en est un de compromis ; moins volumineux mais deux fois plus onéreux qu’au départ.

 

La solution retenue consiste à reconstruire les échangeurs Turcot, De La Vérendrye, Angrignon et Montréal-Ouest  sous les structures existantes ou le long de ces dernières, et à déplacer l’autoroute 20 et les voies ferrées plus au nord, dans la portion comprise entre les échangeurs Turcot et Montréal-Ouest. Cette option coûtera 3 milliards $, selon les prévisions gouvernementales.

 

« C'est un projet de développement urbain dans un contexte de développement durable », a assuré le ministre des Transports du Québec, Sam Hamad, lors de la conférence de presse. Reste que le nombre de véhicules que pourra recevoir  l'échangeur (300 000 par jour) ne sera pas diminué. Le ministre justifie cette décision en invoquant les besoins de Montréal en matière de transport.

 

Plus de place au transport en commun

Les critiques avaient été vives par rapport au projet initial. Tout porte à croire que le MTQ a pris en considération certaines d’entre elles. La création d'un corridor permanent de voies réservées pour les autobus au centre de l'autoroute 20, entre les échangeurs Montréal-Ouest et Turcot, est peut-être un des principaux changements.

 

Des voies réservées sur l’autoroute 720 à l’est de l’échangeur Turcot ainsi que sur le nouveau boulevard Pullman sont aussi prévues. Trois voies dans chaque direction serviront quant à elles à la circulation automobile. Le concept prévoit de plus des espaces pouvant accueillir des corridors ferroviaires, soit une éventuelle ligne de tramway ou une navette aéroportuaire.

 

La largeur des voies et des accotements sera restreinte, afin de réduire l’emprise totale de la route. Cette mesure permettra de diminuer les expropriations d’immeubles, qui passent de 20 à 4. L’aménagement de voies d’accotement rendra également l’infrastructure plus sécuritaire.

 

Meilleure intégration

Plus petit, le nouveau projet permettra de récupérer 400 000 m2 de la cour Turcot, l’équivalent de 50 terrains de football, pour aménager, autour de la rue Notre-Dame, un nouveau quartier. En effet, la Ville de Montréal envisage le développement du Quartier du canal qui pourrait engendrer des retombées économiques de près de 35 milliards $.

Une dalle-parc de 1 900 m2 est prévue au-dessus de l'autoroute, entre la falaise Saint-Jacques et le canal de Lachine pour permettre aux cyclistes et aux piétons de se déplacer d'un lieu à l'autre. Des murs antibruit seront mis en place diminuant le niveau sonore de 1 à 15 décibels, des trottoirs seront élargis et des pistes cyclables seront ajoutées. Les emprises autour des infrastructures routières seront aménagées ; le MTQ prévoit y planter 2 800 arbres et arbustes.

 

Échéancier

Les travaux préliminaires s’étendront encore sur un an. La construction devrait s’amorcer en 2012 pour une mise en service graduelle en 2017. Le projet sera entièrement achevé en 2018. Le gouvernement assure que la circulation sera maintenue en permanence sur l’échangeur actuel puisque la nouvelle structure sera construite en parallèle.

 

Un appel d’offres est présentement en cours pour la réalisation de l’avant-projet définitif. Néanmoins, de nombreuses firmes ont déjà planché sur le dossier. André Leblanc et associés, Axor, Dessau, Dessau/SMi, Ethnoscop, Genivar, Gestion Tecsult/BPR, Groupe SM, Inspec-Sol, Laboratoires SM, Paris-Ladouceur et associés, SNC-Lavalin/Cima +/Dessau de même que SNC-Lavalin/Cima + ont tous collaboré à l’avant-projet présenté la semaine dernière.

 

Aperçu des améliorations apportées

• Réduction de 60 % des remblais, jugés invasifs par la Ville de Montréal ;

• Élargissement du corridor ferroviaire pour faciliter le transport passager ;

• Bonification de 30 mètres de la bande verte entourant la falaise Saint-Jacques ;

• Compensation des émissions de carbone causées par la réalisation du projet ;

• Mise en place d’une station d’échantillonnage de la qualité de l’air au Centre Gadbois ;

• Amélioration de l’offre en transport collectif vers l’ouest de l’île de Montréal, en contribuant financièrement à 50 % des coûts directs d’exploitation ;

• Construction d’une chaussée sur structure entre les rues Saint-Patrick et Laurendeau (plutôt qu’en remblai) ;

• Maintien du passage sous l’autoroute au niveau des rues Eadie et Hadley ;

• Aménagement de places publiques ;

• Augmentation de la fonctionnalité entre les secteurs Côte-Saint-Paul et Cabot (six rues relieront ces deux quartiers) ;

• Prolongement du boulevard De La Vérendrye jusqu’à la rue Saint-Patrick ;

• Création d’un nouveau boulevard Pullman pour relier les rues Notre-Dame et Saint-Jacques ;

• Conversion de l’autoroute Ville-Marie en route nationale.