Redorer l’enveloppe du 600 rue de la Gauchetière grâce à un système de construction abritée

14 novembre 2024
Par Adèle Surprenant

Au 600 rue de la Gauchetière, en plein centre-ville de Montréal, la rénovation et la modernisation de l’enveloppe du bâtiment sont menées à bien grâce à un système inspiré de la méthode UpBrella.

L’été dernier, les fleurs poussaient dans les terre-pleins de Kevric, propriétaire du 600 de la Gauchetière — ancien siège social de la Banque Nationale — depuis 2019. Sur le Square Victoria, le parvis du complexe Maisonneuve ou devant l’entrée de la tour, « les gens se promenaient sur les trottoirs, et ils n’avaient aucune idée qu’au-dessus d’eux, à deux cents pieds dans les airs, on était en train de rénover une façade », raconte Alexandre-Stéphane Boucher, président-directeur général de JCB, l’entrepreneur général derrière le projet de réfection.

 

Suspendue au toit, une nacelle de deux étages entoure pourtant le bâtiment. À l’intérieur, ouvriers, contremaîtres et architectes sont affairés à leur tâche, en toute discrétion. La structure monte et descend en fonction de l’avancée des travaux de rénovation du revêtement, de la fenestration et d’amélioration de l’isolation de la tour. Les travaux sont menés un étage à la fois, sur toutes les façades en simultané. Seul un monte-charge relie l’abri au sol, utilisé pour acheminer les travailleurs et les matériaux.

 

Alexandre-Stéphane Boucher, président-directeur général de JCB. Crédit : Gracieuseté de JCB

 

Une solution signée UpBrella, entreprise de Boucherville à qui Kevric a confié le défi de redorer l’enveloppe de ses 28 étages et d’en perfectionner l’efficacité énergétique. Après s’être illustrée pour son approche novatrice dans la construction neuve, notamment à l’international, l’entreprise de Boucherville se risque pour la première fois aux travaux de rénovation — et le jeu semble en valoir la chandelle.

 

Une solution à toute épreuve

Avant d’être mise au service de la rénovation du 600 de la Gauchetière, la méthode UpBrella a fait ses preuves pour de la construction neuve et de la surélévation. Depuis Montréal, elle a rayonné jusqu’à Nashville, aux États-Unis, et a été mise au service de la Principauté de Monaco pour l’érection d’une tour de 25 logements, la Villa Carmelha, sans gêner les regards exigeants des Monégasques.

 

Réfection de façades du 600 rue de la Gauchetière. Crédit : Gracieuseté JCB

 

Le système développé initialement par UpBrella consiste à bâtir le toit depuis le sol, puis à le soulever grâce à des vérins de levage, laissant ainsi la place à un nouvel étage de prendre forme. Les travailleurs oeuvrent sur des passerelles abritées, accrochées à la structure initiale et hissées avec elle. Cet abri suit donc les étages, au fur et à mesure de leur construction. Adapter cette solution à la rénovation a été tout un défi. « Dans un projet de rénovation de façade, notre abri n’est pas connecté avec l’ensemble rigide du toit : on a une structure au toit, et l’abri est suspendu comme une grosse balançoire de 200 tonnes », explique Joey Larouche, président d’UpBrella.

 

Les bénéfices de l’innovation

Préservés des intempéries, les travaux avancent dans le respect des échéanciers, voire en les optimisant. « L’environnement de travail est mieux adapté et plus efficace », confirme Joey Larouche. De la météo à la productivité, en passant par la qualité et la sécurité, « on contrôle ce qu’on ne contrôle pas dans un environnement à ciel ouvert », poursuit-il.

 

Joey Larouche, président d’UpBrella. Crédit : Gracieuseté

 

« Ça fait 15 mois qu’on travaille et on n’a pas manqué une journée à cause de la météo », confirme David Widmer, chargé du projet chez l’entrepreneur général JCB. Débutés en juillet 2023, les travaux sont exécutés aux trois quarts au moment d’écrire ces lignes, avec une livraison prévue pour avril 2025, réduisant de moitié leur durée initialement prévue par Kevric. La solution est aussi avantageuse en ceci qu’elle limite la pollution sonore et visuelle émise par le chantier. « Quand un projet dure deux ans, c’est important que le chantier soit propre, surtout dans un édifice occupé », comme c’est le cas du 600 de la Gauchetière, soutient David Widmer.

 

David Widmer, chargé de projet, JCB. Crédit : Bénédicte Brocard

 

Sur le plan sécuritaire, il assure par ailleurs qu’« on gère les risques à la source [...], donc les choses ne peuvent pas tomber de l’abri ». Les travailleurs sont eux-mêmes plus en sécurité, et leurs conditions de travail sont nettement supérieures du fait d’être préservés des grands froids comme des grandes chaleurs. Des conditions qui « attire[nt] de la bonne main-d’oeuvre dans l’abri et [qui finissent] par faire la différence », sur la qualité des travaux, se réjouit Joey Larouche.

 

Moderniser aux normes de demain

« L’idée du projet était de rénover l’enveloppe, qui avait besoin d’interventions, tout en améliorant les espaces », résume Rainier Silva, directeur technique chez Neuf Architect(e)s.

 

Rainier Silva, directeur technique chez Neuf Architect(e)s. Crédit : Gracieuseté

 

« Le 600 de la Gauchetière a une signature qui représente une époque dans le quartier international à Montréal. On a essayé de faire un mix, pour arriver à un point d’équilibre entre ce qui avait été conçu au début et améliorer le bien-être des occupants en apportant plus de lumière et de belles vues, sans affecter la balance du complexe Maisonneuve », poursuit-il.

 

Un projet de rétrofit certifié LEED, qui a permis « d’améliorer clairement la performance de l’enveloppe et de réduire les émissions de GES » de la tour, ajoute Fannie St-Gelais, responsable du développement durable auprès de Neuf Architect(e)s.

 

Fannie St-Gelais, responsable du développement durable auprès de Neuf Architect(e)s. Crédit : Gracieuseté

 

Les recherches et visites de terrain qu’elle effectue pour vérifier la durabilité d’UpBrella ont confirmé la pertinence environnementale d’utiliser cette solution, de la meilleure gestion des matériaux à l’optimisation énergétique. Inaugurée en 1983, la tour « a été créée pendant la crise de l’énergie, alors il y avait moins de fenestrations et [les concepteurs] cherchaient plus une économie d’énergie », explique Alexandre-Stéphane Boucher.

 

Maintenant que « la technologie a changé, le client Kevric a réussi à doubler le vitrage tout en gardant le projet carboneutre et en n’ayant pas plus de consommation énergétique », fait-il part avec enthousiasme, rappelant que le succès de l’exécution est dû en partie aux prouesses d’UpBrella.

 

ÉQUIPE DE PROJET
  • Architectes : NEUF Architect(e)s et WZMH Architects, en consortium
  • Ingénieurs en électromécanique : BPA pour la mécanique du bâtiment
  • Consultants en enveloppe : WSP
  • Entrepreneur général : JCB