Transformer les parcs en alliés pour lutter contre les inondations

4 juillet 2024
Par Mathieu Ste-Marie

Une pluie diluvienne qui refoule des égouts et cause des inondations entraînant des conséquences désastreuses pour les citoyens. La ville de Montréal a connu ce scénario maintes fois ces dernières années. Pour prévenir ces catastrophes naturelles, la métropole souhaite diriger l'eau vers des parcs « éponges » plutôt que dans son réseau d'aqueduc déjà surchargé.

En effet, Montréal prévoit aménager une trentaine de parcs éponges et adapter 400 trottoirs éponges pour atténuer les conséquences des pluies abondantes de plus en plus fréquentes dues aux changements climatiques. Jusqu’à présent, sept parcs et 800 trottoirs ont déjà été créés, ce qui permet d’absorber l’équivalent de deux piscines olympiques. « Nous aménageons autant de parcs puisqu’il faut agir rapidement pour diminuer les inondations. De plus, ils se font plus rapidement que les bassins de rétention et coûtent quatre fois moins cher », indique Maja Vodanovic, élue et mairesse de Lachine.

 

Maja Vodanovic, élue responsable de l’eau au comité exécutif de la Ville de Montréal. Crédit : Gracieuseté

 

Ces endroits, souvent gazonnés et complémentaires aux aménagements souterrains, accueilleront l’eau temporairement durant la pluie, créant un petit lac artificiel, puis seront absorbés dans les heures suivant l’intempérie. Ces parcs sont sélectionnés selon leur situation géographique et leur topographie. « Ils doivent être situés dans les points bas afin que l’eau puisse s’y diriger. Actuellement, il y a tellement d’eau qui entre dans les égouts que ces derniers débordent, de sorte que les résidences se trouvant dans les points bas se font inonder », explique Maja Vodanovic. De plus, l’eau retenue dans les parcs n’ira pas dans le fleuve, permettant ainsi d’éviter le rejet de contaminants, ajoute-t-elle.

 

Diriger l’eau vers les parcs

Des travaux et des aménagements devront être effectués pour diriger l’eau pluviale provenant des rues avoisinantes vers ces parcs. Par exemple, la Ville a récemment annoncé qu’une rue sera refaite avec une légère pente vers un parc situé dans l’arrondissement de Verdun, dont les travaux seront terminés à l’automne 2025. De plus, des fosses d’arbres drainantes seront aussi construites le long du parc pour permettre l’infiltration de l’eau dans le sol de celui-ci.

 

Cet endroit comptera une plaine gazonnée avec une aire de détente, un espace de jeu libre, une halte cycliste et une aire d’entraînement où sera installé un mobilier urbain. Dans d’autres parcs éponges, les travailleurs devront creuser la terre pour accueillir l’eau lors des pluies torrentielles. Selon David Courchesne, ingénieur au Service de l’eau de la Ville de Montréal, tous les parcs qui ont le potentiel d’accueillir l’eau pluviale devraient être aménagés à cet effet dans les prochaines années. « Nous allons agir dans tous les secteurs où l’on peut agir. »

 

David Courchesne, ingénieur au Service de l’eau de la Ville de Montréal. Crédit : Chantale Potvin

 

L’aménagement de la trentaine de parcs ainsi que des 400 trottoirs sera financé par l’entente de 117 M$ signée avec le gouvernement du Québec dans le cadre du Plan pour une économie verte.

 

Des défis techniques

L’aménagement de ces endroits représente certains défis techniques, souligne David Courchesne. « Ces parcs doivent conserver leur fonction de parc, c’est-à-dire un endroit où l’on peut lire, jouer et se détendre. Le but est de construire quelque chose pour la population puisque l’endroit sera utilisé par celle-ci dans 95 % du temps. Dans l’autre 5 %, le parc servira à accueillir l’eau pluviale. »

 

Un autre défi réside dans les éléments qui empêcheront l’eau de couler dans le parc. Par exemple, des arbres pourraient être abattus s’ils sont dans le chemin. Règle générale, lors de l’aménagement d’un parc, la Ville fait seulement appel à des architectes paysagistes. Toutefois, pour la création des parcs éponges, ces professionnels seront appuyés par des urbanistes et des ingénieurs civils qui s’y connaissent bien dans la gestion des eaux pluviales.

 

Qu’en est-il des trottoirs ?

Les trottoirs éponges qui seront créés en 2024 et en 2025 comprendront de la terre, des végétaux et des arbres permettant à l’eau pluviale d’être absorbée dans le sol (un peu comme le fait une éponge) plutôt que de se diriger vers les égouts. En plus de nourrir les végétaux et les arbres, ces trottoirs auront un impact positif sur l’air ambiant, surtout lors des canicules. « L’arbre rejette la vapeur d’eau dans l’air, ce qui vient rafraîchir l’espace », explique David Courchesne.

 

« Toutes les rues qui seront refaites dans les prochaines années le seront avec plus de verdissement afin que l’eau puisse s’infiltrer dans la terre », ajoute Maja Vodanovic. Les deux intervenants savent bien que l’aménagement des parcs et des trottoirs n’éliminera pas les inondations à Montréal. Mais, au moins, ces constructions font partie de la solution pour les réduire, estiment-ils.

 

 

LES ESPACES ÉPONGES EXISTANTS ET LEUR CAPACITÉ DE RÉTENTION
  • Parc Pierre-Dansereau (Outremont) 627 000 litres
  • Parc Howard (Villeray–Saint-Michel–Parc-Extension) 624 000 litres
  • Parc Prieur (Ahuntsic-Cartierville) 389 000 litres
  • Place des Fleurs-de-Macadam (Plateau-Mont-Royal) 160 000 litres
  • Parc Dickie-Moore (Villeray–Saint-Michel–Parc-Extension) 70 000 litres
  • Parc Honoré-Mercier (Mercier–Hochelaga-Maisonneuve) (sans rétention)

Notons que le parc qui sera construit en 2025 à Verdun permettra de retenir près de 1 067 000 litres d’eau pluviale, soit plus de 40 % de la capacité d’une piscine olympique. Il s’agit du plus important parc éponge annoncé par Montréal jusqu’à présent.