De Chongqing à Tokyo en passant par Doha, Paris, Londres et New York, des délégations venues de 83 pays se sont réunies la semaine dernière à Cannes pour le MIPIM. Au centre des préoccupations de chacun figuraient la qualité, les opportunités d’investissement peu risquées, le développement urbain et l’impact de la situation tendue du financement de la dette sur le marché européen.
À la fin du salon, le sentiment général des 19 300 participants, dont 4 200 investisseurs, laissait prévaloir le fort intérêt des investisseurs pour les villes et les emplacements prime malgré l’incertitude qui plane sur la disponibilité de financement des banques. Dans ce contexte, beaucoup de villes ont utilisé comme argument de vente leur atout de ne présenter qu’un faible risque.
Comptant parmi les marchés phares de l’immobilier en 2011, l’Allemagne était le pays à l’honneur de cette édition du MIPIM. L’année dernière, le niveau d’investissement en Allemagne a atteint 23,5 milliards d’euros, soit une augmentation de 20 % comparée à 2010, avec 34% des investissements commerciaux réalisés par des investisseurs étrangers. L’immobilier commercial en Allemagne a représenté 42% du volume total des transactions l’année dernière.
D’après la société internationale de conseil en immobilier Savills présente au MIPIM, l’éventuelle pénurie de centres commerciaux en Allemagne devrait créer des opportunités d’investissements, en particulier dans la région de Südlicher Oberrhein, à Münster et à Munich. Savills a ainsi identifié 200 centres commerciaux ayant besoin d’être rénovés, précisant que l’expansion des enseignes sur le marché allemand sera aussi un moteur pour les affaires.
Pendant ce temps, le nouveau sénateur pour le Développement Urbain et de l’Environnement, Michael Müller, a profité du MIPIM pour promouvoir deux projets importants d’immobilier résidentiel ainsi que la rénovation des aéroports Tempelhof et Tegel.
L’impact de la situation chaotique de la zone euro a été au centre de la conférence bondée de Joschka Fischer, ancien ministre des Affaires Etrangères allemand. Commentant l’éventualité d’un retrait général de l’euro, Joschka Fischer a plaisanté en disant qu’« il est facile de faire une omelette avec des œufs. Il est plus difficile d’obtenir des œufs à partir d’une omelette ». Pour l’ex-ministre des Affaires Etrangères, la nouvelle politique de l’Allemagne vis-à-vis du nucléaire aura, dans son pays mais aussi au-delà de ses frontières, « un impact important sur le secteur de l’immobilier et lui offrira des opportunités considérables ».
Les études sur l’industrie envisagent l’avenir
Au cours du MIPIM, une série d’études et d’analyses a été dévoilée pour dresser un état des lieux de l’immobilier à l’international.
Selon l’étude de Cushman & Wakefield intitulée Global Property Investment Outlook, « malgré un état d’esprit prudent sur la plupart des marchés immobiliers, on s’attend à une hausse possible de 20% du niveau d’activité lors du deuxième semestre 2012, conduite par une confiance accrue et un déblocage de la demande des investisseurs et des locataires ».
L’étude souligne une hausse de 42% de l’investissement en immobilier industriel en Asie et une hausse de 26% dans le commerce, avec un intérêt particulier pour la Chine. Cette étude de Cushman & Wakefield prévoit que l’Allemagne et les pays nordiques attireront les investisseurs à la recherche d’actifs peu risqués, Londres et Paris offrant une bonne croissance à moyen terme tandis que la Russie et la Turquie, qui sera pays à l’honneur du MIPIM 2013, intéresseront plutôt les sociétés à la recherche de retours sur investissement importants.
Evaluation du risque, gestion de fonds, conditions de la dette et situation du marché international de l’immobilier, faisait partie des thèmes abordés par les grands investisseurs institutionnels et les représentants de fonds de pension et fonds souverains participant au premier sommet à huis-clos de l’investissement, RE-Invest, le 6 mars.
« Le marché de l’immobilier est en pleine évolution, très diversifié et complexe, avec des niveaux d’opportunité d’investissement différents selon les régions du monde. Nous avons lancé RE-Invest pour stimuler le dialogue et les échanges d’idées entre décideurs du secteur de l’investissement institutionnel », commente Filippo Rean, directeur du MIPIM.
Les villes et le sport, moteurs de grands projets
Avec l’extension de l’espace d’exposition du MIPIM autour du Palais des Festivals de Cannes, les grands projets n’ont pas manqué cette année, bon nombre d’entre eux étant liés à des événements sportifs majeurs.
L’adjoint au Maire de Londres, Sir Edward Lister, a échangé avec les participants sur l’impact du parc olympique Queen Elisabeth. L’important développement réalisé pour les Jeux Olympiques de cette année a jusqu’à présent généré 14,9 milliards d’euros d’investissement.
Parmi les nouveaux projets dévoilés au MIPIM, on peut citer la ville de l’innovation Skolkovo en Russie qui se proclame l’équivalent de la Silicon Valley. Destinée à accueillir 45 000 personnes lors de son achèvement en 2015, Skolkovo s’est fixé un objectif de 50% de consommation d’énergie en provenance de sources renouvelables.
Sur le vaste stand de la région de Krasnodar, les participants ont pu admirer l’immense maquette du parc olympique de Sochi qui comprend un circuit de Formule 1 et un complexe multi-sports de 83 hectares, Gorod Sporta, incluant un stade de football de 50 000 places.
Quant à l’Italie, le développement ambitieux du front de mer d’Ostia dévoilé par la ville de Rome a suscité beaucoup d’intérêt. Le maire de Rome, Giovanni Alemanno, a déclaré aux participants du MIPIM que son administration s’était engagée à faciliter l’investissement dans la capitale italienne avec la création d’une nouvelle agence de développement et le prochain lancement d’un plan stratégique de développement. Il a ajouté qu’une nouvelle charte de qualité destinée à standardiser les procédures de développement « aidera directement les investisseurs et améliorera aussi le climat d’investissement ».
Le 7 mars, le Ministre français de la Ville, Maurice Leroy est venu au MIPIM pour soutenir le gigantesque projet du Grand Paris qui inclut 140 kilomètres de nouvelles lignes de métro reliant les villes de la région parisienne ainsi que la construction de 70 000 nouveaux logements par an jusqu’à 2030. Soulignant l’approche du début du chantier – après des années de discussions autour du projet - la Société du Grand Paris s’est présentée au MIPIM pour la première fois. L’organisme public est notamment responsable du métro Grand Paris Express et des infrastructures de transport.
Dans le nord de la France, l’attention est tournée vers Calais et son projet logistique Calais Premier conçu pour être un centre de chemin de fer et d’autoroute intégré comprenant des entrepôts, des équipements de déchargement ferroviaire ultra rapide et un parc d’activité. Calais Premier est l’un des projets présenté sur le pavillon logistique du MIPIM, qui a accueilli également les développements d’installations logistiques de Barcelone et de Marseille autour de leurs ports respectifs.
Le Qatar nourrit un débat sur la durabilité
Le Qatar pourrait bien être l’un des investisseurs actuels les plus actifs du marché international de l’immobilier avec plus de 50 projets évalués à 30 milliards d’euros répartis dans 30 pays. Pourtant, c’est sur le développement durable urbain que s’est focalisé cet état du Golfe au MIPIM 2012.
De très nombreux professionnels ont convergé vers le spectaculaire pavillon du Qatar - qui réunissait sur deux étages Qatari Diar, Msheireb Properties et la société Lusail Real Estate Development - pour participer au forum urbain du Qatar. Ce programme de deux jours de conférences et débats avait pour thème ‘l’architecture durable et le développement urbain’.
En ouverture, l’architecte de renommée internationale Lord Richard Rogers a déclaré : « Le plus important changement dans ma vie a été la reconnaissance de l’importance de l’environnement ».
Parmi les projets ambitieux exposés sur le pavillon du Qatar se trouvait le développement du centre ville de Doha mené par Msheireb Properties, un projet conçu pour moderniser la partie historique de Doha tout en respectant l’héritage existant et les critères de développement durable urbain.
« Nous présentons ici le centre ville de Doha parce qu’il raconte une autre histoire du Qatar », a expliqué Omar Saudi, Directeur du Marketing de Msheireb Properties. « Nous pensons qu’il est un exemple d’une approche réfléchie du développement. C’est l’engagement du Qatar à l’égard du développement durable que nous avons souhaité souligner dans le forum urbain. Msheireb Properties espère que la ville de Doha servira de modèle pour les futurs développements de villes dans le monde. Il est important pour nous que chacun comprenne que lorsque nous envisageons un projet, la première question que nous nous posons est de savoir quelle sera sa plus value au sens le plus large du terme et non pas seulement au niveau financier. Nous parlons de valeurs sociales et de valeurs pour le pays ».
La durabilité était également un thème central du programme inaugural de Building Innovation au MIPIM, présentant des initiatives pionnières qui accroissent la valeur de l’immobilier. « Pour assurer un meilleur retour sur investissement, les sociétés d’aujourd’hui doivent regarder au-delà de la gestion purement financière de leur portefeuille immobilier. Les constructions doivent maintenant être conçues avec l’idée qu’elles recevront plusieurs locataires au cours de leur durée de vie et que ces derniers auront des besoins différents. Fonctionnalité, facilité d’utilisation, adaptabilité et durabilité sont désormais des éléments clés des bâtiments et de leur gestion. Le programme Building Innovation répond à ces problématiques et met en avant quelques initiatives importantes », a conclu le directeur du MIPIM, Filippo Rean.