Tel qu’en a récemment fait état un rapport publié par McGraw Hill Construction pour le compte du CBDCa1, le marché du bâtiment vert au Canada se porte très bien. Du moins, c’est l’opinion, recueillie via un sondage en ligne, de 200 entreprises œuvrant dans le domaine de la construction au pays. À la lecture de ce rapport, on apprend que la demande des clients et la volonté d’agir correctement ont été, selon les entreprises interrogées, les deux éléments ayant le plus encouragé et facilité la construction de bâtiments durables en sol canadien au cours des dernières années.
Le fait que le bâtiment de qualité ait de plus en plus la cote auprès des donneurs d’ouvrage constitue une excellente nouvelle. Mais au-delà du sentiment d’avoir fait les choses comme il se doit, qu’en est-il de la performance réelle de ces bâtiments « verts » ? En termes de confort des occupants et de consommation énergétique, est-il vrai d’affirmer qu’un bâtiment certifié LEED offre un rendement supérieur en comparaison à un bâtiment « conventionnel » ?
C’est dans le but de répondre à ces questions qu’un groupe de chercheurs du Conseil national de recherches du Canada (CNRC) a mené une large étude post-occupationnelle au sein de 24 édifices de bureaux (12 verts et 12 conventionnels) localisés en Amérique du Nord (Canada et nord des États-Unis)2.
Enquête exhaustive
Cette vaste étude menée par le CNRC comportait plusieurs volets. Le premier a consisté en l’analyse de données obtenues après la distribution d’un questionnaire à plus de 2 500 occupants. Ce questionnaire s’intéressait à une multitude de sujets tels que : la satisfaction par rapport à l’environnement de travail, la satisfaction par rapport au travail et l’engagement envers l’organisation, la santé et le bien-être des occupants.
Pour sa part, le deuxième volet de l’étude a permis de colliger des données sur les conditions thermiques, la qualité de l’air, l’acoustique et l’éclairage pour un important échantillonnage de postes de travail. Les dimensions de ces postes, la hauteur des plafonds, l’accès aux fenêtres, le type d’occultation, le système d’éclairage artificiel et les finitions des surfaces ont aussi été compilés. Au final, tout près de 1 000 postes ont été documentés pendant l’étude.
En parallèle, l’équipe de recherche a aussi analysé les données recueillies par le New Buildings Institute pour 100 bâtiments commerciaux certifiés LEED en Amérique du Nord. L’analyse combinée de ces données et de celles obtenues par le CNRC a permis de comparer la performance de bâtiments certifiés à celle de bâtiments non certifiés et d’en tirer plusieurs conclusions des plus intéressantes.
Le verdict
Au final, il apparaît que les bâtiments verts, de l’avis de leurs occupants, offrent des environnements intérieurs d’une qualité supérieure en comparaison à des aménagements au sein de bâtiments conventionnels similaires. En résumé, les éléments se démarquant dans les bâtiments verts sont le confort thermique, la qualité des vues offertes sur l’extérieur, l’esthétique générale des installations, le faible dérangement sonore occasionné par les bruits issus des systèmes de CVCA et la qualité de l’air.
D’autre part, les bâtiments certifiés LEED analysés affichent une consommation d’énergie généralement moindre que celle des bâtiments conventionnels similaires. D’après les chercheurs, les bâtiments verts utilisent en moyenne entre 18 % et 39 % moins d’énergie que leurs comparables non certifiés. Ceci étant dit, il importe de souligner que la certification n’est pas garante d’une consommation énergétique inférieure. À ce sujet, les chercheurs font remarquer qu’ils ont pu identifier plusieurs bâtiments certifiés n’ayant pas été en mesure de répondre aux attentes en matière de performance énergétique.
LEED en constante évolution
Puisque rien n’est parfait, notons que l’étude permet aussi de conclure que la qualité acoustique des environnements analysés, contrairement aux autres caractéristiques considérées, n’est pas nécessairement meilleure au sein des bâtiments certifiés. L’évaluation subjective effectuée par les occupants et colligée à l’aide des questionnaires a permis de démontrer que, de manière générale, les environnements de travail décloisonnés afin de maximiser les vues sur l’extérieur et l’apport de lumière naturelle avaient tendance à nuire à l’intimité acoustique. Concernant ce point, les chercheurs rappellent la nécessité d’accorder plus d’importance à la notion d’acoustique lors de la conception d’environnements de travail. Notons que la version v4 de LEED propose désormais un crédit portant spécifiquement sur la performance acoustique des bâtiments, soit un pas de plus dans la bonne direction.
1. Canada Green Building Trends: Benefits Driving the New and Retrofit Market, rapport disponible pour téléchargement sur le site web de la section du Québec du CBDCa (http://batimentdurable.ca)
2. Do green buildings outperform conventional buildings? Indoor environment and energy performance in North American offices, rapport disponible pour téléchargement sur le site web du CNRC (http://www.nrc-cnrc.gc.ca)
L’auteur est stagiaire en architecture chez Coarchitecture (anciennement Hudon Julien Associés), bénévole au sein de la section du Québec du CBDCa et membre d’ECOOP, une coopérative offrant divers services de consultation en science du bâtiment.
Cette chronique est parue dans l’édition du vendredi 26 septembre 2014 du journal Constructo. Pour un accès privilégié à l’ensemble des contenus et avant-projets publiés par Constructo, abonnez-vous !