Certification : pourquoi se contenter de peu ?

7 juin 2016
François Cantin, M. Sc. Arch.

Le domaine du bâtiment vert et durable est en constante évolution. Lentement, mais sûrement, le marché se métamorphose pour le mieux.

Dans les faits, tandis que la condition générale de la planète ne cesse de se détériorer, il est avantageux pour tous que les standards de qualité et de performance dans le domaine de la construction se raffermissent continuellement. Au cours des dernières années, c’est principalement l’apparition de diverses certifications telles que LEED, WELL, BOMA BEST et LBC qui a largement contribué à maintenir le marché à l’affût tout en encourageant ses divers intervenants (professionnels, propriétaires, entrepreneurs, etc.) à se dépasser.

 

En guise d’exemple, la récente certification WELL se présente, entre autres choses, comme un complément à une certification LEED. Celle-ci se veut un référentiel permettant de mesurer, de certifier et de surveiller la performance d’un bâtiment en ce qui a trait à sa capacité à assurer et maintenir la santé ainsi que le bien-être de ses occupants. Comme tout élément nouveau nécessitant une période d’adaptation plus ou moins longue, WELL suscite quelques réactions mitigées, voire très négatives.

 

Coûts de certification élevés

Un des arguments les plus souvent entendus visant à discréditer une démarche de certification WELL concerne les frais élevés d’une certification. Les dénigreurs s’empressent d’affirmer qu’une certification combinant LEED et WELL aura tôt fait de faire doubler les frais de certification comparativement à une simple certification LEED. Bien que l’on ne puisse nier les frais supplémentaires, un argumentaire échafaudé sur l’aspect monétaire a, dans les faits, bien peu de poids dans la balance lorsque vient le temps d’évaluer la pertinence d’un système de certification.

 

Dans le cas d’édifices de bureaux, soit le type de bâtiment actuellement couvert par la certification WELL, rappelons qu’environ 90 % de l’argent investi sur l’ensemble du cycle de vie du projet correspond aux salaires et aux avantages sociaux versés aux occupants. Ainsi, si WELL remplit, ne serait-ce que partiellement, son objectif de contribuer au confort des occupants, il est fort à parier que la productivité et le bien-être de ces derniers en seront affectés positivement. Ce qui, au final, aura le potentiel de se traduire en un rapide rendement de l’investissement en ce qui a trait aux frais de certification.

 

En termes de dollars, un « simple » gain de productivité de l’ordre de 1 % correspond à une somme très largement supérieure à celle investie en amont du projet pour en assurer la qualité grâce à une démarche de certification. Affirmer le contraire démontre un manque flagrant de vision et se veut incompatible avec une approche dite durable.

 

Confort vs performance

D’autres mentionnent que WELL manque carrément la cible en faisant abstraction de la performance énergétique et de la longévité des bâtiments. De ce fait, WELL ne tiendrait pas compte de l’enjeu le plus important du moment, soit la réduction nécessaire des émissions de gaz à effet de serre. Certains vont jusqu’à affirmer que les acteurs du marché seraient mieux avisés d’investir leur argent dans des bâtiments plus performants (sur le plan énergétique et mécanique) que d’investir dans une certification visant le bien-être des occupants.

 

Est-il souhaitable de favoriser le confort des occupants au détriment de la performance d’un bâtiment ? Bien sûr que non ! Ceci dit, bien qu’il soit temps de passer rapidement et concrètement à l’action afin d’assurer la pérennité de notre planète, il demeure regrettable de devoir choisir entre performance et confort (bien-être et santé). Aussi banal que cela puisse paraître, force est d’admettre qu’il est facile de perdre de vue l’objectif premier de la majorité des édifices, soit loger et accommoder des occupants. Ainsi, construire un bâtiment des plus performants sur le plan énergétique, mais offrant un confort limité, apparaît fondamentalement ridicule.

 

Vision d’avenir

Au lieu de choisir entre confort et performance et, par le fait même, d’encourager le nivellement vers le bas, il semble logique et surtout plus motivant de chercher à maximiser ces deux aspects. Nous avons les connaissances et disposons des technologies nécessaires pour imaginer et construire de meilleurs bâtiments et de meilleures villes. Pourquoi s’en priver ?

 

L’auteur est chargé de projet chez Coarchitecture, spécialiste en stratégie d’occupation et en confort visuel au sein des environnements de travail ainsi que bénévole au sein du CBDCa - Québec. 

 

Cet article est paru dans l’édition du vendredi 6 mai 2016 du journal Constructo. Pour un accès privilégié à l’ensemble des contenus et avant-projets publiés par Constructo, abonnez-vous.