Des chercheurs de l’École de criminologie de l’Université de Montréal ont élaboré un système d’indicateurs statistiques permettant de détecter des modèles de collusion potentielle dans les processus d’appels d’offres et d’attribution des contrats publics de construction.
Pour mener à bien cette étude, les chercheurs, dirigés par le professeur Carlo Morselli, ont étudié les données tirées de 15 000 soumissions déposées et contrats dans 100 municipalités québécoises, de 2002 à 2013.
Il y a présence de collusion lorsque le même groupe de firmes communiquent entre elles pour s’assurer un roulement stable et régulier de contrats, tout en étant capables d’empêcher les firmes extérieures au cartel de soumissionner aux appels d’offre. Pour assurer la pérennité d’un système de truquage des appels d’offres tout en minimisant les risques de détection, les participants à ces ententes recourent souvent aux soumissions de complaisance afin de laisser l’impression d’une libre compétition.
Détecter la collusion
Afin de bien évaluer la présence de collusion pour l’attribution de contrats dans les municipalités, l’équipe de chercheurs a créé une matrice possédant un « noyau » et une « périphérie ». Lorsqu’un noyau de firmes soumissionnaires gagnantes est en mesure de maintenir un nombre régulier et stable de contrats sur plusieurs années, la présence de tricherie apparaît alors dans le système d’indicateurs statistiques.
À partir des types de contrats attribués, du nombre et des noms des soumissionnaires, du montant de chaque soumission déposée et du nom de la firme retenue, le professeur Morselli a mis au point un coefficient d’hétérogénéité qui mesure la répartition des soumissionnaires entre le noyau d’une matrice et sa périphérie.
Concrètement, plus le coefficient d’hétérogénéité est élevé sur la matrice, plus on s’approche d’un marché « fermé » et théoriquement à risque de collusion : ceux qui sont près du noyau obtiennent et se partagent les contrats, tandis que ceux en périphérie n’arrivent que rarement à déposer une soumission.
Un nouvel outil
L’objectif du groupe de chercheurs vise à ce que les gouvernements utilisent éventuellement leur système de vérification pour qu’ils puissent déceler la collusion. Le programme de recherche touche une grande quantité d’informations publiques qui seraient négligées par les institutions publiques depuis longtemps.
Ce nouvel outil vient atténuer l’argument qui affirme que la collusion est difficile à repérer, et force ainsi les autorités à intervenir où les règles du jeu sont détournées à l’avantage de certains. L’assurance d’une concurrence saine dans l’octroi des contrats publics ne peut être que bénéfique.
Source : Université de Montréal