Le 22 janvier dernier, la section de Québec du Conseil du bâtiment durable du Canada conviait ses membres à un débat traitant de l'impact d'une certification LEED sur la qualité en architecture. Autour de la table de discussion, quatre intervenants fin prêts à livrer leurs impressions et opinions sur la question : Rémi Morency, architecte associé chez Groupe A et vice-président de l'Ordre des architectes du Québec (OAQ), Claude Bourbeau, architecte associé principal chez Provencher Roy et associés, Jacques Plante, architecte et professeur à l'École d'architecture de l'Université Laval ainsi qu'Anne Guérette, architecte et conseillère municipale pour Démocratie Québec.
C'est avec grand intérêt que les participants ont écouté les panélistes faire état de leur vaste expérience dans le domaine de l'architecture durable et de leurs réflexions mûries sur le sujet.
Innovation vs qualité architecturale
D'entrée de jeu, Rémi Morency, porteur du message de l'OAQ en ce qui a trait à la qualité architecturale, pose les bases de la discussion. Il mentionne que, par le passé, si certains projets à saveur verte ont préconisé le déploiement de technologies avancées et le recours à une science avant-gardiste, ces choix ont souvent été faits au détriment du lien unissant le bâtiment, ses occupants et son contexte d'implantation.
Ce manque de cohérence, ajoute-t-il, généralement engendré par la recherche d'une signature témoignant du caractère innovant des bâtiments, a plus souvent qu'autrement nui à l'aspect esthétique des projets. Monsieur Morency fait appel à la sensibilité des concepteurs afin que leur travail contribue à ériger le patrimoine de demain.
Pour sa part, Claude Bourbeau nous rappelle que LEED est d'abord et avant tout un outil d'évaluation qui, en aucun cas, ne pourra compenser un manque de connaissance face à notre climat et la non-compréhension de l'impact de nos gestes sur l'environnement. Ces éléments, de même que la qualité des constructions, ne devraient jamais être délaissés au profit d'une innovation, et ce, quelle qu'elle soit.
Monsieur Bourbeau ajoute qu'une course à l'innovation peut nuire au projet d'architecture puisqu'elle a le potentiel de nous éloigner des techniques et des méthodes de construction éprouvées qui nous ont pourtant bien servis par le passé.
Volonté : donneurs d'ouvrage et monde politique
Rappelant son expérience en lien avec la conception et la réalisation du projet de La Tohu - Cité des arts du cirque à Montréal (première salle de spectacle certifiée LEED de niveau Or en Amérique du Nord), Jacques Plante mentionne que l'exemplarité de cette réalisation, à la fois sur le plan architectural et au niveau des stratégies mécaniques qu'elle intègre, découle d'une vision forte, exprimée clairement par le client, et ce, dès les premières étapes du processus de conception.
Pour monsieur Plante, un outil tel que la certification ne saurait remplacer l'implication soutenue d'un client et sa volonté de vouloir faire pour le mieux, mais peut très certainement la compléter. Jumelée au souhait de l'architecte de proposer des œuvres pérennes, une commande ambitieuse et balisée par un système d'évaluation augmente substantiellement les chances de générer un projet à valeur ajoutée.
Tel que le mentionne Anne Guérette, c'est ce désir du dépassement qu'il faut encadrer et encourager en tant que société. Pour ce faire, une volonté politique franche se traduisant par un plus grand nombre de programmes et de mesures incitatives s'impose. Celle-ci permettrait d'inciter un maximum de donneurs d'ouvrage à aborder leurs projets autrement.
Au-delà des budgets et du temps à consacrer, madame Guérette constate que les architectes gagneraient à s'impliquer davantage au niveau politique, ne serait-ce que pour former les élus en poste et les outiller afin qu'ils puissent gérer adéquatement le développement de la ville de demain. L'architecte mérite une place de choix, il n'en tient qu'à lui de la réclamer et de s'impliquer !
S'impliquer
Pour de plus amples renseignements sur la section du Québec du CBDCa, pour devenir membre ou bénévole ou simplement pour connaître le calendrier des activités à venir, vous pouvez consulter le site officiel de la section au http://batimentdurable.ca/.
L’auteur est stagiaire en architecture chez Coarchitecture (anciennement Hudon Julien Associés), bénévole au sein de la section du Québec du CBDCa et membre d’ECOOP, une coopérative offrant divers services de consultation en science du bâtiment.
Cette chronique est parue dans l’édition du jeudi 30 janvier 2014 du journal Constructo. Pour un accès privilégié à l’ensemble des contenus et avant-projets publiés par Constructo, abonnez-vous !