Le Centre de transfert et de développement d’affaires de l’Université du Québec à Chicoutimi (CTDA-UQAC) devrait bientôt ouvrir ses portes. Les travaux de construction sont terminés ; on s’affaire actuellement à y installer un outil susceptible d’intéresser grandement les entreprises qui œuvrent dans le secteur de la transformation de l’aluminium. Ce 19e pavillon du campus universitaire abritera en effet un équipement unique au Québec pour l’assemblage de l’aluminium à l’aide d’une technique avant-gardiste et relativement jeune : le soudage par friction malaxage.
Le soudage par friction malaxage arrive au Québec
« C’est un procédé qui a été développé en Angleterre, de mémoire il y a une vingtaine d’années. Il y a quelques compagnies en sol nord-américain qui ont des licences pour utiliser cette technologie-là. Au Québec, nous allons être les seuls à avoir une machine de soudage par friction malaxage à portée industrielle. Il y en a quelques-unes, mais ce sont des petites, qu’on observe au sein de laboratoires. Nous, on va être capables de souder 54 pieds de long sur 9 pieds de large », fait valoir le professeur Louis Dussault, responsable du projet.
« La première vocation, à la base, c’est d’accueillir des entreprises qui vont nous soumettre des problèmes. Et, avec les étudiants, les profs et l’ensemble de tout le parc technologique complémentaire qu’on a, ce sera de faire du transfert et du développement d’affaires », explique le professeur, qui souligne que l’on trouve à l’UQAC « probablement la plus grande concentration de chercheurs dans le domaine de l’aluminium ».
Un bâtiment en bois lamellé-collé
Le bâtiment couvre quelque 560 mètres carrés et environ six mètres de haut. On y trouvera en fait deux pièces d’équipement (une machine et un robot) ainsi qu’une salle de réunion. Bien que de taille modeste, sa structure, entièrement en bois lamellé-collé de Chantiers Chibougamau, a été conçue avec la possibilité d’être dotée d’un pont roulant de 20 tonnes.
La construction du bâtiment a été confiée à Constructions Tect-Hab, à la firme d’ingénierie BPR et aux Architectes associés - Boulay, Fradette et Boudreault. Les fondations ont été réalisées par Construction CGP. Il s’agit d’une base en béton armé avec double armature, d’une épaisseur variant entre 25 et 75 centimètres.
Le projet d’ensemble requiert des investissements de 5 685 000 $, dont environ 2 millions $ pour la construction proprement dite. S’ajoutent à cela près de 800 000 $ pour les coûts d’exploitation du centre durant une période de trois ans. Ces sommes sont presque entièrement déboursées par Ottawa, en vertu du programme Croissance des entreprises et des régions. L’organisme municipal Promotion Saguenay contribue à hauteur de 500 000 $.
Accessible aux entreprises
Né en 1991 au Welding Institute (TWI), à Cambridge, au Royaume-Uni, le soudage par friction malaxage (SFM, tiré du terme anglais friction stir welding ou FSW) fait appel à un outil de forme cylindrique avec épaulement. Mis en rotation à une vitesse de quelques centaines de tours par minute, l’outil génère juste assez de chaleur pour ramollir le métal, sans toutefois le rendre liquide.
Cette technique de soudage à l’état pâteux, qu’explore le Centre national de recherche du Canada (CNRC) au Centre des technologies de l'aluminium, aussi situé sur le campus de l’UQAC, et qu’utilisent certaines entreprises comme Remac Innovateurs, à Chicoutimi, offre plusieurs avantages. Celui, entre autres, d’accroître la qualité et l’esthétique des joints, de conserver les propriétés du métal et de minimiser sa déformation. Il permet l’assemblage d’alliages instables ou difficiles à souder avec une méthode traditionnelle, de structures massives ou minces, voire des alliages de natures différentes. Cette méthode entièrement mécanique, qui ne génère pas de fumée toxique, permet de réaliser des économies d’énergie.
De nouvelles avenues pour l’aluminium
Le nouveau pavillon s’adresse aux PME qui œuvrent dans le secteur de l'aluminium et qui désirent obtenir un soutien technique et technologique pour mettre au point des prototypes et faire des tests sur de nouveaux produits qui leur permettront d’être plus concurrentielles. Il constituera aussi, en collaboration avec l’équipe du CNRC, une sorte de centre de recherche industrielle exclusivement consacré à cette technique d’assemblage, à laquelle des entreprises étrangères, notamment étatsuniennes, ont déjà accès. C’est d’ailleurs le CRIQ qui a conçu la cellule robotisée de soudage qu’utilisera le CTDA et qui permettra d’assembler des pièces de grande dimension, ce qui n’existait pas au Québec jusqu’à ce jour.
Si cette technologie s’adresse principalement aux manufacturiers et aux fabricants, de remorques de camions ou de wagons par exemple, elle s’avère également d’intérêt pour le secteur de la construction, comme pour les tabliers de ponts. Louis Dussault donne en exemple le pont d'aluminium en arc d'Arvida, ouvrage de génie civil construit à la toute fin des années 40 et maintenant reconnu comme monument historique.
« C’est un pont entièrement fabriqué en aluminium, qui existe encore et qui est en excellent état », fait remarquer le professeur, qui entrevoit, avec cette technologie, de nouvelles avenues pour ce matériau, particulièrement en cette période de renouvellement des infrastructures.
Cet article est paru dans l’édition du mardi 8 mai 2012 du journal Constructo. Pour un accès privilégié à l’ensemble des contenus et avant-projets publiés par Constructo, abonnez-vous !