Prévenir les maladies respiratoires grâce à l'APR

6 octobre 2022
Par Mathieu Ste-Marie

Sous forme de gaz, de fumées, de vapeurs ou de poussières, les contaminants peuvent mettre en danger la santé ou même la vie des travailleurs de la construction. Pour minimiser l’exposition à ceux-ci, le port d’un appareil de protection respiratoire (APR) peut être nécessaire.

Avant même de penser à enfiler un APR, les employeurs doivent d’abord évaluer les risques présents dans l’air du milieu de travail, notamment en se posant les questions suivantes : Quels sont les contaminants ? Par exemple, est-ce qu’il y a de l’amiante, de la silice cristalline, du plomb ou des solvants de nettoyage ? Ensuite, ils doivent se demander si des exigences réglementaires spécifiques sont définies en fonction de la tâche (ex. : niveaux de risque pour l’amiante, exposition à des poussières découlant du décapage au jet d’abrasif). En l’absence d’exigences réglementaires spécifiques liées aux tâches, les employeurs devront se poser ces autres questions : Quelles sont les concentrations des contaminants dans l’air et les valeurs d’exposition admissibles ? Combien de temps le travailleur va-t-il être en contact avec le contaminant ? Est-ce que le travailleur est exposé à un seul ou à plusieurs contaminants ? Quel est la concentration d’oxygène dans l’air ?

 

En fonction des réponses obtenues lors de l’évaluation du risque, les employeurs pourront déterminer la nécessité de faire porter un APR aux travailleurs, mais aussi la nature de la protection qui sera adéquate. « Pas besoin d’être en désamiantage pour être exposé à l’amiante, explique Charles Labrecque, chimiste et conseiller expert en prévention- inspection à la CNESST. Les travailleurs peuvent y être exposés en effectuant des travaux de plomberie, d’électricité ou dans du gypse. De plus, la silice est assez présente en construction. On peut y être exposé dès que l’on coupe ou perce du béton, par exemple. »

 

Charles Labrecque, chimiste et conseiller expert en prévention-inspection à la CNESST. Crédit : Gracieuseté

 

Par contre, il faut savoir que l’utilisation d’un APR constitue une solution de dernier recours. L’employeur doit, si possible, contrôler ou améliorer la qualité de l’air en éliminant un contaminant ou en remplaçant celui-ci par un autre moins dangereux.

 

Dans le secteur de la construction, la substitution peut être un moyen à envisager dans certains cas (ex. : colle, solvant pour nettoyage de surface, peinture). Toutefois, cette avenue n’est pas toujours possible. Les travailleurs de ce secteur doivent intervenir dans des environnements où les contaminants sont déjà présents.

 

« L’exposition à un contaminant n’oblige pas automatiquement le port d’un APR », affirme à juste titre Charles Labrecque. Dans certaines situations, la ventilation et l’abattage des poussières par l’eau va, par exemple, permettre de diminuer l’exposition. Le port du masque, dans ce cas, pourrait ne plus être nécessaire. Si son port devient inévitable, l’employeur devra évaluer le risque pour déterminer quel type d’appareil de protection respiratoire devrait être employé.

 

Deux grandes catégories

Il existe deux grandes catégories d’APR : l’appareil à épuration d’air, qui purifie l’air contaminé de la zone de travail et celui à approvisionnement d’air. Dans la première grande catégorie, on retrouve l’appareil à épuration d’air non motorisé et celui à ventilation assistée. L’appareil à épuration d’air non motorisé utilise la force inspiratoire du travailleur pour faire traverser l’air dans le milieu épurant. Il est fréquemment employé sur les lieux de travail. Différents types de filtres existent. Trois niveaux d’efficacité des filtres (95, 99 et 100) sont disponibles.

 

Ils filtrent respectivement 95, 99 et 99,97 % des particules. Quant à l’appareil à ventilation assistée ou motorisé, une pompe aspire l’air du milieu de travail pour le faire passer au travers d’un élément d’épuration. Dans la deuxième grande catégorie, on retrouve l’appareil à adduction d’air et l’APR autonome. Celui à adduction d’air utilise un tuyau pour acheminer l’air comprimé vers le travailleur, alors que dans l’APR autonome, l’air peut provenir d’une bonbonne d’air comprimé respirable transportée par le travailleur. Le niveau de protection conféré par celui-ci variera en fonction de la pièce faciale choisie et du mode de fonctionnement. Ainsi, un demi-masque à épuration d’air n’offrira pas la même protection que celui à adduction d’air.

 

De graves conséquences

Les travailleurs qui n’utilisent pas de protection respiratoire, alors que la situation l’exige, s’exposent à des risques pour leur santé. En contact avec l’amiante ou avec la silice cristalline, ils pourraient souffrir respectivement d’amiantose ou de silicose, deux maladies respiratoires sévères. De plus, si le travailleur est exposé à un niveau d’oxygène inférieur à 19,5 %, le manque d’oxygène pourra causer sa mort si la déficience en oxygène est trop sévère. Dans cette situation, seul l’APR à approvisionnement d’air (autonome ou à adduction d’air) permettra de protéger le travailleur.

 

Malgré ces risques, certains travailleurs, jugeant l’appareil inconfortable, décident de ne pas le porter. D’autres ne veulent pas être obligés de raser leur barbe qui peut nuire à l’étanchéité du masque. « C’est un enjeu, car pour certains gars la barbe fait partie de leur identité. Pour s’en départir, ils doivent vraiment comprendre l’importance du danger. C’est pourquoi la formation est très cruciale pour que les travailleurs comprennent pourquoi ils doivent porter ce type de protection », souligne Charles Labrecque.

 

Selon lui, il y a plus de chances que les travailleurs utilisent cet appareil si l’employeur les implique dans le choix de l’APR. « L’employeur doit parler aux travailleurs et ne pas se limiter à imposer son port. Si l’employeur les consulte, les travailleurs vont l’utiliser, ils vont bien le faire et vont maintenir l’appareil en bon état de fonctionnement pour qu’il offre une protection optimale. C’est pour cette raison qu’en présence d’un comité de santé et de sécurité, les travailleurs doivent être impliqués pour choisir celui qui, tout en étant conforme, est le mieux adapté à la tâche », explique Charles Labrecque.

 

D’ailleurs, ce dernier invite les travailleurs à ne pas entreposer leur appareil de protection respiratoire dans leur coffre à outils en dessous du marteau, par exemple. Le masque pourrait se déformer et nuire à l’étanchéité, ce qui pourrait laisser entrer les contaminants sur le visage. De plus, le masque ne doit pas être exposé à la lumière, à la chaleur, à l’humidité excessive ni au froid extrême. Ces conditions peuvent également nuire à l’étanchéité en diminuant la flexibilité des APR ou en les déformant.

 

LA BONNE UTILISATION D’UN APR EN SIX ÉTAPES
  • Le choisir en fonction du milieu ou de la tâche à effectuer
  • Avoir reçu une formation et avoir réussi un essai d’ajustement (fit test)
  • L’inspecter avant chaque utilisation
  • Éviter toute entrave à l’étanchéité et effectuer la vérification de celle-ci
  • Le porter durant toute la période d’exposition aux contaminants
  • L’APR doit être nettoyé, entretenu et entreposé adéquatement
Source : Guide sur la protection respiratoire de la CNESST