Renforcement du pont des Piles : un projet audacieux

Construit en 1978, le pont des Piles, situé à la jonction de l’autoroute 55 et de la route 155 et qui permet de rejoindre la Haute-Mauricie, a subi un premier renforcement dans les années 1990, à la suite duquel on l’a doté de capteurs afin de suivre son évolution. Au courant des années 2010, un rapport faisait état de certaines conditions problématiques à surveiller. Vers la fin de cette décennie, des fenêtres exploratoires ont été percées afin de constater l’état de la structure de l’intérieur. Si tout semblait normal en 2017, des travaux d’entretien réalisés en 2019 ont révélé que le béton s’était dégradé par endroits. « On s’attendait à une dégradation, mais pas nécessairement aussi importante », explique Roxanne Pellerin, porte-parole régionale pour la Mauricie et le Centre-du-Québec au ministère des Transports du Québec (MTQ). « Il y avait notamment des répercussions sur la capacité du tablier à absorber les charges pour lesquelles il avait été conçu. » Une analyse des essais de chargement effectuée en novembre 2021 et les données de l’instrumentation récoltées au début de l’année 2022 ont mené à la décision de fermer le pont de façon préventive le 3 février dernier, et ce, jusqu’à ce que les travaux de renforcement soient complétés.

Le pont actuel est un pont à poutre-caisson unique en béton précontraint. Comme solution pour le renforcer, la firme de conception engagée, CIMA+, a proposé au MTQ de construire des pylônes et des haubans afin de venir supporter à différents points le pont, qui deviendra ainsi hydride. « C’est vraiment un concept audacieux », précise Anne-Sophie Richard, chargée de projet pour les travaux de renforcement de cette structure. « Ont été présentés d’autres types de renforcement, mais ils étaient moins adaptés et plus risqués », souligne-t-elle. Des haubans, composés de 21 à 42 torons, c’est-à-dire des tiges d’acier faites de sept brins d’acier torsadés et protégés par une gaine de plastique, s’accrocheront au centre du tablier de façon symétrique. « En tout, la structure de renfort comptera 600 torons », mentionne Anne-Sophie Richard. « Et on a construit sur les rives, aux approches, des massifs d’ancrage qui permettent de fixer au roc ces torons. Au centre, des structures composées de consoles d’acier et d’entretoises passeront à travers le tablier et faciliteront l’ancrage des haubans à l’intérieur en trois points. »

Un avantage de l’option choisie par le Ministère est que le démantèlement du pont existant, appelé à disparaître dans les prochains mois, se verra simplifié. « Pour procéder avec une structure de ce type, c’est important de construire des pylônes et des haubans pour la retenir, sinon elle s’effondrera. C’est une intervention qu’on fait plus tôt dans le processus pour garder le pont en service », indique Roxanne Pellerin. Les équipes prévoient amorcer la construction du nouveau pont, un pont en arc en acier et à tablier supérieur qui sera situé en aval de l’existant, au printemps 2023. Les travaux devraient s’échelonner sur trois ans et les appels d’offres devraient paraitre à l’hiver 2023. « À l’automne, les travaux préparatoires de déboisement commenceront », dévoile la porte-parole.

Le présent projet de renforcement peut compter sur Tetra Tech pour la surveillance, SNC-Lavalin pour le suivi en assurance qualité, et Eurovia Québec, division Mauricie, agit à titre d’entrepreneur général. Le chantier a débuté le 11 février dernier et les travailleurs ont déjà amorcé la pose des haubans en juillet, ce qui permet peut-être d’envisager pour l’automne la fin des travaux, initialement prévue pour la fin décembre. Le budget du projet, estimé en urgence, rappelons-le, à neuf millions, est en voie d’être révisé à la hausse.