Si les affiches de réglementation et les équipements sanitaires n’étaient pas là pour le rappeler sur les chantiers de Ronam Constructions, il serait difficile d’y remarquer qu’une pandémie frappe le Québec. C’est que l’entreprise a su s’adapter en pleine tempête, se réorientant vers les secteurs qu’elle estimait être les leviers d’une éventuelle relance économique.
Sur la dizaine de chantiers auxquels elle s’affairait et sur les nombreux autres qui s’apprêtaient à être lancés, plusieurs projets privés ont été remis dans les cartons pour de bon. Pour certains clients provenant par exemple des secteurs de la restauration ou de l’hôtellerie, avec qui Ronam a l’habitude de faire affaire, l’arrêt des activités a signifié celui des plans de construction ou de réaménagement.
Mais pour l’entreprise de Lévis, cette pause temporaire était plutôt une bonne raison de se retrousser les manches. « Les gens de bureau ont continué en télétravail, surtout ceux de l’estimation, qui ont mis les bouchées doubles pour soumissionner sur des projets publics, explique Karine Bourque, directrice générale. Parce qu’on savait que ça allait repartir rapidement de ce côté et que les projets allaient aller de l’avant. »
Et au-delà du public, Ronam a orienté son démarchage et son développement vers des clients privés pour qui les activités ont au contraire été encouragées par la pandémie. « Tout ce qui est épicerie, pharmacie, toute notre clientèle pour qui la COVID-19 a augmenté le chiffre d’affaires, on se recentre là-dessus. »
Des chantiers en changement
Son collègue, Pierre Chrétien, surintendant général, parle de son côté d’une erre d’aller retrouvée sur les chantiers, qui en étaient à leur troisième semaine d’activité depuis la reprise, lors de cet entretien. S’il dit tous ses travailleurs de retour au boulot et contents de l’être, il assure également être agréablement surpris de l’ouverture démontrée par les donneurs d’ouvrage.
« [Ils] sont très compréhensifs. On a révisé nos échéanciers, on les a prévenus des couts supplémentaires et il y a une ouverture à ce niveau, des négociations qui sont entamées. Ça va très bien de ce côté-là aussi. »
Nouvelle réglementation sanitaire oblige, nombre de pratiques et d’habitudes ont dû faire leur place au chantier, comme partout ailleurs au Québec. Bien que Pierre Chrétien insiste pour dire que l’équipe « n’est pas à plaindre », il n’en reste pas moins que lui et Karine Bourque soulignent d’importants couts reliés au nettoyage. La fréquence nécessaire de celui-ci dans les salles à manger, les roulottes et les toilettes, par exemple, nécessitant beaucoup d’organisation.
Rien toutefois pour faire ombrage à ce retour réussi. « On ne savait pas trop comment ça allait se passer, vu qu’on était dans l’inconnu, explique la directrice générale. Et finalement, on se rend compte à l’usage que les habitudes se changent, que les gens s’adaptent. Nos sous-traitants ne sont pas arrivés sans savoir ce qui se passait. Tout le monde, le gouvernement, la CEGQ, toutes les associations, ont tellement aidé l’industrie que lorsqu’on a recommencé, on était prêts. »
Les défis à venir
Quant aux défis qui pourraient se pointer à l’horizon, celle-ci évoque la possibilité de certains enjeux concernant la livraison des matériaux. Alors que d’une part, il pourrait éventuellement y avoir une surcharge d’ouvrage pour les transporteurs, et que d’une autre, certaines usines de fabrication d’équipements aux États-Unis ne fonctionnent pas à plein rendement.
En ce qui a trait à l’accélération de projets qui pourrait découler de l’adoption de la loi no 61, Karine Bourque voit là aussi quelques risques. « On s’entend que les professionnels, architectes et ingénieurs ont déjà les tables pas mal pleines. Alors je ne sais pas comment ça va se passer en pesant encore plus sur l’accélérateur. »
Sinon, c’est une fin d’été fertile en chantiers qui s’annonce pour Ronam. Bien que sa directrice générale s’assure de « toucher du bois » en s’avançant là-dessus, elle dit l’impact des projets annulés moins grand que prévu, la plupart ayant été remplacés. « On se compte chanceux, mais on ne connait pas l’avenir; s’il y a une autre vague, on aura peut-être d’autres projets qui seront arrêtés. »