L’évaluation de rendement insatisfaisant peut-elle être contestée ?

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9 juillet 2014 | Par Mathieu Turcotte

En 2008, le gouvernement du Québec s’est donné un pouvoir important dans le cadre de la gestion de ses contrats de construction, soit celui d’émettre une évaluation de rendement insatisfaisant à l’égard des entrepreneurs et professionnels œuvrant sur des contrats publics.

C'est ainsi que les règlements pris en vertu de la Loi sur les contrats des organismes publics, qui s'appliquent au gouvernement et organismes publics provinciaux, prévoient la possibilité d'inclure une clause d'inadmissibilité à même les documents d'appel d'offres permettant de refuser tout fournisseur qui, au cours des deux dernières années, a fait l'objet d'une telle évaluation de rendement insatisfaisant, qui a refusé de donner suite à un contrat ou qui a fait l'objet d'une résiliation basée sur son défaut d'en respecter les conditions.

 

Une telle clause a donné lieu à peu de décisions des tribunaux depuis son entrée en vigueur, mais avait déjà été validée par la Cour supérieure, dans l'affaire Consultants Aecom inc. c. Société immobilière du Québec, rendue à l'été 2012. Depuis, des dispositions semblables ont été introduites dans les lois municipales, donnant la possibilité aux municipalités d’émettre des évaluations négatives dans un cadre similaire aux organismes publics.

 

Le processus contesté une fois de plus

Un jugement récent, rendu le 20 juin dernier dans l’affaire Construction DJL inc. c. Procureur général du Québec, est venu une fois de plus confirmer la validité, de prime abord, des dispositions introduisant le pouvoir d’évaluation négative à l’issue d’un contrat public.  Dans cette affaire, le MTQ avait émis une telle évaluation à l’égard de l’entrepreneur général Construction DJL au terme de travaux sur la structure de l’autoroute 720.

 

Reprochant le processus suivi, l’absence de motifs précis et le caractère manifestement déraisonnable de l’évaluation, DJL a présenté une requête pour ordonnance de sauvegarde et pour suspension de la décision du MTQ.

 

Le Juge Prévost, de la Cour supérieure, a rejeté le recours de l’entrepreneur, rappelant que la décision du MTQ étant administrative, elle n’avait pas à être motivée de façon extensive, et ajoutant de surcroît que le simple fait de suspendre l’application de la mesure décrétée par le MTQ équivaudrait à soustraire l’entreprise à l’application de la Loi.

 

Ce jugement vient confirmer qu’à moins de prouver la mauvaise foi ou le caractère totalement abusif à première vue d’une évaluation de rendement négatif, il sera bien difficile pour un fournisseur d’en contester la teneur. Paradoxalement, les conséquences d’une telle mesure peuvent être importantes, voire catastrophiques pour certains entrepreneurs qui pourraient se trouver privés de participer à des appels d’offres publics pendant les deux années suivantes.

 

 

 

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