Qui peut demander le remplacement d'une hypothèque légale ?

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27 août 2014 | Par Me Jean-Benoît Hébert

Lors d'un billet précédent, j’ai discuté de la substitution d’une hypothèque légale par une autre garantie. Au risque de me répéter, je traiterai à nouveau ce sujet puisque la Cour d’appel a rendu une décision qui mérite d’être soulignée dans l’affaire Coffrage Alliance ltée c. Groupe Aecon Québec inc.1

Sans entrer dans les dédales des procédures qui sont propres au monde des avocats, il y a lieu de concentrer le présent billet sur la question ci-dessous examinée par la Cour d’appel : Est-ce qu’une autre personne que le propriétaire de l’immeuble peut demander le remplacement de l’hypothèque légale de la construction par une autre garantie et, dans l’affirmative, dans quelle situation ?

 

En effet, le Code civil prévoit à l’article 2731 que le propriétaire de l’immeuble peut s’adresser au Tribunaux pour substituer à l’hypothèque une autre sûreté suffisante. Lire ici : remplacer l’hypothèque légale sur l’immeuble par une garantie monétaire, cautionnement ou autre garantie bancaire afin de libérer l’immeuble de cet embarras.

 

Or, certains auteurs et certaines décisions pouvaient paraître ouvrir la porte à ce qu’un entrepreneur général puisse bénéficier de la substitution prévue à l’article 2731 du Code civil du Québec. Dans l’affaire Coffrage Alliance ltée c. Groupe Aecon Québec inc., la Cour d’appel est claire à ce sujet :

 

« Avec égards, je suis d’avis que cette interprétation n’est pas fondée, car non seulement heurte-t-elle directement le texte, mais elle attribue aussi un sens erroné aux jugements d’où elle tire son origine. »

 

Néanmoins, la Cour d’appel souligne qu’à l’extérieur du cadre d’application de l’article 2731 du Code civil, une personne autre que le propriétaire pourrait, dans des circonstances exceptionnelles,  demander une « ordonnance de sauvegarde » pour que le Tribunal ordonne de remplacer l’hypothèque par une garantie suffisante.

 

« À l’analyse de précédents, j’estime que la qualité de propriétaire n’est pas essentielle à l’obtention d’une ordonnance de sauvegarde visant à substituer une sûreté suffisante à une hypothèque légale de la construction. Mais encore faut-il que la partie requérante puisse invoquer à son soutien les circonstances exceptionnelles justifiant le recours à pareille mesure, ce qui, à n’en pas douter, constitue un lourd fardeau. »

 

La Cour d’appel donne comme exemple de « circonstances exceptionnelles » le déni de justice flagrant ou l’inexistence de tout autre moyen pour la préservation de ses droits.

 

Donc, ce que vous devez retenir se résume à ceci : la plupart du temps, seul le propriétaire de l’immeuble peut demander à remplacer une hypothèque légale de la construction par une garantie autre. Dans certaines circonstances exceptionnelles, une autre personne que le propriétaire (par exemple l’entrepreneur général)  pourrait obtenir une ordonnance du Tribunal visant à remplacer l’hypothèque légale de la construction par une autre garantie. Il pourrait s’agir d’un recours utile lorsque des circonstances exceptionnelles le justifient.

 

1. 2014 QCCA 1254.