Ne laissez pas la paperasse vous ralentir : gérez vos documents de construction efficacement

3 avril 2024
Par Émilie Lavergne

Les documents qui gravitent de près ou de loin autour de la gestion d’un projet de construction se comptent par dizaines. La gestion documentaire, souvent négligée, devrait pourtant être au coeur des préoccupations de tout entrepreneur, car elle permet d'économiser du temps, de l'argent et de réduire le stress.

Un sondage effectué auprès de 599 acteurs du secteur de la construction provenant de plusieurs pays, et mené par la firme FMI Corporation et PlanGrid, un leader dans la conception de logiciels, démontre que 35 pour cent du temps des employés est consacré à des tâches non optimales. Les salariés passent en moyenne 5,5 heures de leur semaine à chercher des informations. Combien d’entrepreneurs peuvent se vanter de mettre la main sur n’importe quel renseignement d’importance en moins de deux minutes ? Pourtant, il s’agit d’un objectif possible à atteindre, selon Aurélie Sottiau, gestionnaire documentation et information chez CREO Solutions. « C’est exactement le temps maximal qu’on devrait consacrer à la recherche de documents. Quand tout est bien géré, on ne se pose pas la question si l’on détient la dernière version de tel ou tel truc », souligne-t-elle. Elle ajoute, d’un même souffle « qu’une copie papier perd rapidement toute sa valeur puisqu’il est impossible de réellement savoir si on possède la dernière version. »

 

Aurélie Sottiau, gestionnaire documentation et information chez CREO Solutions. Crédit : CREO Solutions

 

Ce même sondage illustre que le tiers des mauvaises décisions prises par les entreprises sondées sont attribuables à des données erronées. « En tant que gestionnaire, il faut être en mesure de prendre des décisions rapidement, mais surtout des décisions éclairées et pour cela, il faut avoir en main des faits, des données fiables. Nous sommes tous imputables de nos décisions », explique Jean-François Bertrand-Pelletier, vice-président technologie et expérience client chez CREO Solutions. En effet, si le temps est un agent d’une grande valeur, la justesse des informations l’est elle aussi. Un projet qui peut se dérouler en plusieurs phases et même sur plusieurs lieux géographiques ne devrait pas se buter à une gestion documentaire approximative. Plus les employés sont confiants quant à l’exactitude des informations qu’ils ont en main, plus leurs risques d’erreur s’amenuisent.

 

Une question de protection

« Il faut que quiconque soit capable de s’y retrouver pendant les travaux, mais surtout après le chantier ! Plus il y a de sous-traitants, de fournisseurs ou d’employés, plus il est facile d’avoir des malentendus. Et tout ça peut mener à d’importants litiges », observe Stéphane Morin Pépin, ingénieur en construction et étudiant au doctorat en gestion et planification de projet de construction à l’École de technologie supérieure. Selon le doctorant, il n’est pas rare qu’un entrepreneur doive retracer différentes étapes d’un échéancier, expliquer des changements de plans, de matériaux ou de coûts avec des preuves et des informations factuelles.

 

Stéphane Morin Pépin, ingénieur en construction et étudiant au doctorat en gestion et planification de projet de construction à l’École de technologie supérieure. Crédit : Gracieuseté

 

« Personne ne souhaite finir débouté devant des avocats parce qu’il n’a pas été en mesure de prouver la légitimité de ses décisions. Pourtant, ça fait partie de la réalité. Surtout quand de gros montants sont en jeu », poursuit Stéphane Morin Pépin. Cette réalité est encore plus probable dans le cas de projets publics, où des révisions peuvent être demandées. D’autant plus que tout projet de construction nécessite une grande faculté d’adaptation. De ce fait, la gestion documentaire s’inscrit au même titre que la gestion des risques sur un chantier : « Il ne faut pas attendre d’avoir des problèmes d’un point de vue légal ou d’être en froid avec un fournisseur. Il s’agit d’un type de gestion des risques très important. Il faut être en mesure de retourner 30 ans en arrière dans nos documents et démontrer chacune de nos décisions », soutient Aurélie Sottiau.

 

Par où commencer ?

Pour plusieurs, une transformation numérique peut sembler aussi complexe que de réussir un casse-tête les yeux fermés. La variété de logiciels peut aussi donner le vertige. Il faut donc, d’abord, circonscrire les besoins. Aurélie Sottiau, qui accompagne plusieurs entreprises dans ce virage, explique que nombreux facteurs doivent être considérés : « On prend en compte la volumétrie financière du projet, le nombre d’intervenants, puis on structure le projet. » Et quel serait le meilleur moment pour un chargé de projet d’attaquer cette gestion ?

 

Jean-François Bertrand Pelletier, vice-président technologie et expérience client chez CREO Solutions. Crédit : CREO Solutions

 

« Le plus tôt possible. Une gestion documentaire efficace peut débuter six mois en amont d’un chantier », ajoute-t-elle. Si un conseil prévaut pour nos trois interlocuteurs lors de l’adoption d’un nouveau système, c’est de ne pas lésiner sur l’accompagnement. « C’est une gestion de changement qu’il faut instaurer auprès de son équipe. Il faut prévoir de la formation et insister sur les gains en efficacité pour ses employés », souligne Jean-François Bertrand-Pelletier. Il est donc, d’abord et avant tout, essentiel que l’entrepreneur à la tête du projet croit aux avantages d’optimiser sa gestion documentaire. Qu’il s’agisse de l’augmentation d’efficacité sur le terrain en réduisant les pertes de temps, de l’archivage adéquat de tous les éléments légaux gravitant autour des projets ou de l’optimisation de la circulation de l’information entre toutes les parties prenantes.

 

En ce qui concerne la formation, l’implication des employés les plus habiles ou expérimentés s’avère elle aussi un atout : « Il peut être plus facile de former d’abord les employés ayant un intérêt et les aptitudes pour bien maîtriser un système, ensuite progressivement on instaure la formation dans les équipes. On peut aussi nommer des personnes de référence dans l’entreprise », fait remarquer Stéphane Morin Pépin.

 

Un changement bien de son temps

Les outils numériques pour faciliter la prise de décision, la communication entre les différentes équipes et l’efficacité de ses employés existent. D’ailleurs, plusieurs autres secteurs économiques ont adopté, à différents niveaux, une approche technologique en ce qui a trait à leur gestion. Qu’on pense aux commerces de détail ou aux géants de la vente en ligne qui maîtrisent la gestion des stocks, la facturation et la livraison dans des délais très courts.

 

« La gestion documentaire se traduit par une meilleure efficacité dans les opérations, donc par une réduction des coûts. Et tout cela entraîne nécessairement, à son tour, une réduction du stress », conclut Aurélie Sottiau.