1 août 2023
Par Émile Lavergne

Amorcés le 27 février 2017, les travaux entourant la construction du nouveau pont Gouin et la démolition de l’ancien se sont échelonnés jusqu’à la fin du mois de juin 2021. Retour sur la réalisation d’un pont bien particulier.

Cette artère routière importante reliant les secteurs de Saint-Jean et d’Iberville à Saint-Jean-sur-Richelieu, et sur laquelle défilent chaque jour 200 000 véhicules, a représenté un défi d’ingénierie pour les différents intervenants sur le chantier.

 

La conception du nouveau pont, situé au nord de l’ancien pont, dans l’axe de la rue Saint-Jacques et de la 5e Avenue, a été confiée à l’entreprise WSP. C’est d’ailleurs cette même compagnie qui est derrière la conception du pont no 9 du canal de Chambly, qui a remporté le prix de l’Institut canadien de la construction en acier pour le meilleur projet en acier du Québec en 2012, et qui repose sur le même concept d’ingénierie du présent pont Gouin.

 

Ayant requis plus de 1 000 tonnes d’acier pour sa construction, le pont Gouin a maintenant une longueur de 650 mètres (m), il est construit plus haut et plus large que l’ancien pont et il possède une toute nouvelle structure mobile, un pont basculant. La largeur du tablier de 10,6 m comprend une voie de circulation dans chaque direction, deux trottoirs de béton et quatre belvédères d’observation. De plus, une piste cyclable est aussi aménagée, puisque le pont est un lien important de la Route Verte.

 

Le contrat de construction a été octroyé à Pomerleau. Les responsabilités de l’entreprise incluaient la construction du pont levier, la restauration des deux approches du nouveau pont et des infrastructures municipales, l’aménagement paysager sur les deux rives, les travaux des pieux de caissons maritimes et la démolition du vieux pont existant.

 

Un défi au rythme des saisons

Alors qu’on a l’habitude de voir une grande activité sur les chantiers routiers en période estivale, c’est plutôt le contraire qui rythmait celui-ci. C’est le passage des bateaux et la période de frai des poissons, entre autres, qui rendaient impossibles les opérations de chantier en période d’été. C’est donc entre octobre et mai que devaient s’ériger les charpentes d’acier et la structure mobile du pont à venir, ainsi que le démantèlement du vieux pont.

 

C’est le Groupe ABS qui a été mandaté par le ministère des Transports et de la Mobilité durable (MTMD) pour la surveillance et le contrôle de qualité des opérations et des matériaux. « D’après nous, c’est un des chantiers les plus complexes avec les voies routières, maritimes et piétonnières qui demandaient en simultané des travaux de pavage, de coffrage, de construction de murs, de compaction sans oublier la disposition des sols environnementaux », commente Steve Guénard, directeur de projets chez Groupe ABS.

 

Simon Ducharme, directeur de projets chez Pomerleau. Crédit : Pomerleau

 

Du côté de Pomerleau, on abonde dans le même sens en termes d’ampleur du défi logistique. « Pomerleau détient tout l’équipement maritime nécessaire pour ce type de chantier, mais c’est tout de même beaucoup de précautions à prendre pour diminuer les impacts environnementaux », souligne Simon Ducharme, directeur de projets pour l’entreprise.

 

Afin de limiter l’empiètement sur les fonds marins tout en donnant accès à la machinerie aux sections du pont, des jetées de pierres lavées ont été installées pour éviter que des particules fines ne se retrouvent dans l’eau. Ces mêmes jetées ont ensuite été retirées pour restituer l’état naturel du cours d’eau.

 

La coordination, la clé du succès

« Vu la complexité d’un pont mobile avec son volet hydraulique, mécanique et électrique, additionnée à la proximité des artères commerciales dont le souci d’accessibilité était omniprésent pour nous, avec en plus de cela tous les intervenants impliqués dans une sphère ou un autre du projet, c’était essentiel de tenir régulièrement des réunions de coordination », explique Simon Ducharme.

 

Le pont Gouin, outre la circulation des automobiles, des cyclistes et des piétons, est aussi une voie de passage pour une conduite de refoulement des eaux usées et de plusieurs services publics, comme la fibre optique et l’électricité. Chaque sous-traitant devait être tenu dans la boucle afin de savoir quand le changement d’installation devait avoir lieu. Ajouté à cela, le réseau électrique aérien a été enfoui sous terre aux abords du pont. Les mécanismes de surveillance du MTMD, de Parcs Canada, de WSP et de Pomerleau ont permis de structurer toutes les étapes du chantier jusqu’à sa complétion.

 

Démantèlement de l’ancien pont

Quelques mois avant sa démolition, l’échéancier a dû être repoussée quelque peu vu les délais de construction. Le Groupe ABS a procédé à son inspection pour assurer la sécurité des utilisateurs et celui-ci a pu demeurer fonctionnel.

 

Finalement, entre le 26 octobre 2019 et le mois de novembre 2020, c’est une structure mobile composée de 2 travées, ainsi que de près d’un demi-kilomètre de pont en acier avec 18 travées fixes, du pont d’origine de 1915, qui a été démolie. Pomerleau a usé d’ingéniosité pour retirer les charpentes des piliers de béton du canal. Des enceintes de confinement ont dû être installées autour de chaque pilier pour éviter que l’eau contaminée par la démolition du béton ne s’écoule dans la nature. L’eau était ensuite décantée et traitée avec de la glace sèche pour ajuster son niveau de pH, avant que l’enceinte ne soit retirée. Cette opération limitait le démantèlement à deux piliers par semaine.

 

 

Au total, la contribution du gouvernement du Québec au projet s’élève à 94,3 millions de dollars et le gouvernement du Canada a financé une portion de 18,7 millions. De son côté, la Ville de Saint-Jean-sur-Richelieu a investi à hauteur de 26 millions, dont près de la moitié a servi à améliorer le réseau municipal dans le secteur.