Optimiser la mécanique du bâtiment pour économiser

20 décembre 2016
Par Marie Gagnon

Hydro-Québec s’attaque au rendement des équipements mécaniques en proposant un outil de commissionnement en continu et promet des économies d’énergie appréciables, surtout dans le grand bâtiment.

Le rendement des systèmes de chauffage, de ventilation et de climatisation (CVC) peut avoir une incidence directe sur la consommation énergétique globale d’un bâtiment. C’est également le cas au niveau de ses coûts d’exploitation, il va sans dire. À cet égard, la détection rapide des défaillances techniques s’avère cruciale. D’autant plus qu’elle participe à prolonger la durée de vie des équipements et assurer le confort des occupants en leur offrant de meilleures conditions intérieures, deux bénéfices tout aussi appréciables.

 

Pour soutenir les gestionnaires dans l’optimisation énergétique de leurs bâtiments, les chercheurs du Laboratoiredes technologies de l’énergie (LTE) de l’Institut de recherche d’Hydro-Québec ont mis au point un logiciel de commissionnement en continu, destiné à monitorer les équipements de CVC. Baptisé SAEB, pour système d’analyse énergétique du bâtiment, ce logiciel dépiste les défectuosités des systèmes mécaniques dès qu’elles surgissent et permet ainsi d’y remédier promptement.

 

« L’efficacité énergétique des bâtiments, c’est important pour Hydro-Québec, indique d’entrée de jeu Audrey Giguère, conseillère en communication pour la société d’État. Surtout qu’on constate que le parc immobilier vieillit. Selon nos données, le secteur du bâtiment commercial et institutionnel représente à lui seul une consommation de 34 térawatts-heure. C’est énorme. En travaillant à améliorer l’efficacité énergétique de ces bâtiments, on espère réduire de 10 à 15 % leur demande d’énergie globale et de 5 % la demande de pointe dans ce marché. »

 

Bilan en continu

Selon les chercheurs du LTE, les erreurs de programmation seraient tout aussi fréquentes que les bris d’équipements. Et elles peuvent facilement passer sous le radar, entraînant au passage une hausse de la consommation énergétique du bâtiment. En offrant aux opérateurs d’immeubles un outil de commissionnement continu pour optimiser l’exploitation et l’entretien des installations mécaniques tout au long de leur durée de vie utile, les chercheurs espèrent faire économiser gros à Hydro-Québec.

 

 

Relié aux sondes de température présentes dans le bâtiment, le SAEB réalise des bilans énergétiques en temps réel en effectuant un balayage constant des points de contrôle des systèmes de ventilation, de climatisation et de chauffage. Les données ainsi acquises sont ensuite reportées dans un tableau de bord et traduites au moyen d’un code couleur – vert, jaune, rouge – indiquant à l’opérateur les points sous surveillance et les points de défectuosité.

 

 

« Le logiciel fournit des données pour effectuer un diagnostic et certaines informations pour vérifier le fonctionnement d’un système, pour aiguiller les recherches, souligne Karine Lavigne, chercheure et chargée de projet au LTE. Par exemple, si un combat chaud-froid est détecté dans une zone, le système va informer l’opérateur de cette dualité, mais il ne pourra pas en identifier les causes. Ce sera à l’opérateur de déterminer si le capteur est défectueux ou si le volet de prise d’air est bloqué. »

 

Intégration universelle

Elle ajoute que le SAEB ne nécessite aucun équipement, ni appareil supplémentaire. Il utilise les sondes en place et fonctionne en parallèle avec les contrôles de CVC installés dans le bâtiment. Contrairement aux autres systèmes de gestion énergétique offerts dans le marché fonctionnant uniquement au moyen d’un langage propriétaire pour communiquer avec le réseau, le logiciel mis au point par les chercheurs du LTE fonctionne au moyen d’une communication IP et de BACnet, un protocole spécifié par l’ASHRAE (American Society of Heating, Refrigerating and Air Conditioning Engineers). Ouvert à tous les systèmes, il est aussi très répandu en Amérique du Nord.

 

« L’opérateur n’a pas besoin non plus de recourir aux services d’un ingénieur pour rédiger les règles de calcul qui serviront à identifier les défaillances, indique Karine Lavigne. Toute l’installation peut être faite par un technicien, à condition qu’il connaisse bien les points de contrôle. Il n’aura qu’à les étiqueter d’un code-barres, puis à nous fournir la cartographie du système pour que nous entrions ces informations dans le logiciel. C’est assez long cependant. Il faut compter une cinquantaine d’heures pour la cartographie, l’étiquetage et la mise en route. »

 

En rodage depuis 2015, le SAEB a été installé jusqu’ici dans cinq établissements d’Hydro-Québec, ciblés en fonction de la disponibilité des techniciens, ainsi qu’à la Maison du développement durable à Montréal, un édifice certifié LEED Platine en 2013. Ces versions préliminaires ont permis d’identifier les forces et les faiblesses du système. Une version finale devrait être disponible à compter de 2017.